Photo A340 en maintenance
A340 F-GLZF en maintenance

Présentation des méthodes d'analyse MSG-1 / MSG-2 / MSG-3

Icone d'une clef et d'un tournevis

"Le MSG-3 ou comment sont élaborés les programmes de maintenance dans le milieu aéronautique" par P. Dumas

Episode 1 : Aux temps anciens

Tout a commencé en 1930.

"Le MSG-3 est si vieux que cela ?"
Non. Le MSG-3 viendra bien plus tard mais en 1930, fut édictée la 1ère exigence en matière d'entretien des avions. On la doit à la "Transport Airline Inspection Service" américaine (à laquelle la célèbre FAA succédera). Dans son bulletin 7E section 5, était mentionné que "les instruments et accessoires devront être révisés à intervalles adéquates pour garantir leur fonctionnement correct à tout instant". Ce concept d'entretien (qu'on appellera plus tard "Hard time") restera la référence dominante en matière de maintenance aéronautique jusque dans les années 60.

"Comment étaient gérés les programmes de maintenance à l'origine ?"
C'étaient des programmes simples sans d'autre analyse que l'expérience personnelle des mécaniciens et des pilotes. Néanmoins, l'émergence de nouvelles compagnies aériennes et le développement de l'aviation commerciale allaient commencer à faire bouger les choses. Dans les années 50, l'arrivée des avions à réaction démocratisa un peu plus encore l'aviation et la pression s'intensifia sur les constructeurs afin que leurs avions soient encore plus sûrs, de part leur conception mais aussi de part les recommendations de maintenance fournies aux compagnies. Ce fut l'âge d'or du concept "Hard time". Tout élément pouvant être révisé l'était à intervalles donnés. On estimait alors que la fiabilité des équipements était inversement proportionnelle à leur âge ou à leur temps de fonctionnement et qu'un entretien régulier était la condition nécessaire pour réduire la probabilité de panne.

"Ce n'est pas le cas ?"
Pas toujours mais à cette époque là, on imaginait les courbes de fiabilité d'équipements difficilement autrement que sous la forme d'une baignoire (c'est à dire débutant par un taux de pannes important dû au rodage, suivi par une période de temps durant laquelle les pannes sont moins nombreuses et se terminant par une remontée du taux de défaillances dûe à l'âge). Il fallut attendre le début des années 60 pour que des études commencent à être menées. Elles mirent en évidence le fait que certaines pannes n'étaient pas prévisibles quelle que soit la maintenance effectuée et que pour la plupart des éléments, la probabilité de panne n'augmentait pas avec l'âge ou le temps de fonctionnement. (Pour les plus avertis : voir la figure 1 à droite tirée d'une étude conduite par United Airlines). Pire que cela, les révisions et les déposes puis installations nécessaires à ces révisions pouvaient avoir dans certans cas un impact négatif sur la fiabilité.

"Trop de maintenance peut être néfaste ?"
Oui c'est cela. Ces études conduisirent aussi à la création d'un nouveau concept d'entretien (appelé "On-condition" c'est à dire en fonction de l'état). Il ne s'agissait plus de réviser systématiquement et à tout va mais d'effectuer à la place, des inspections ou des vérifications sur les équipements le permettant, afin de s'assurer de leur bon état de fonctionnement. Enfin, en 1967, United Airlines développa un processus nouveau pour élaborer des programmes de maintenance par l'utilisation de diagrammes de décision. Pour être véritablement prises en compte, ces évolutions n'attendaient plus qu'un événement important. Il prit la forme d'un avion bien plus gros que ses prédécesseurs avec de nouveaux moteurs et de nouvelles technologies : le Boeing B747. Sans rupture dans la façon d'aborder la maintenance programmée de cet avion, les coûts d'entretien auraient été exhorbitants sans gain supplémentaire en terme de fiabilité ni en terme de sécurité.

Episode 2 : le MSG-1

Résumé de l'épisode 1 : Vers la fin des années 60, la future mise en service du Boeing B747 imposait de revoir le processus de définition des programmes de maintenance avion, sous peine de rendre dissuasif l'achat de ce "géant des airs" à cause de coûts de maintenance trop élevés. Quasiment à la même période, United Airlines finalisait une nouvelle approche pour le développement des programmes de maintenance, basée sur l'utilisation de diagrammes de décision.

Année 1968 aux Etats-Unis. En s'appuyant sur les travaux de United Airlines, un groupe de personnes composée (principalement) de représentants de constructeurs d'avion, de compagnies aériennes et des Autorités américaines (la FAA) fut chargé d'élaborer un processus nouveau utilisable pour la définition du programme de maintenance du B747. Ce comité connu sous le nom de "747 Maintenance Steering Group" publia les conclusions de son étude dans un document appelé "MSG-1 Maintenance Evaluation & Program Development". Ce document fut approuvé peu de temps après par la FAA. La méthode d'analyse MSG-1 (Maintenance Steering Group 1ère du nom) venait de naître.

"MSG signifie donc "Maintenance Steering Group". Cela donne quoi en français ?"
"To steer" veut dire conduire, diriger. Un "Steering Group" c'est un groupe directeur, un comité de pilotage. Ainsi, le "747 Maintenance Steering Group" c'était le comité de pilotage (pour la définition) de l'entretien du B747. Pour être précis, "MSG-1" signifie "Maintenance Steering Group 1st task force" c'est à dire le premier groupe de travail (1st task force) du comité de pilotage (pour la définition) de l'entretien (du B747).

"Peut-on avoir un exemple concret de ce que le MSG-1 a apporté ?"
Bien sûr. En voici même deux :
. Sur un B747, une compagnie aérienne devait consacrer environ 70 000 heures de travail pour les inspections de la structure avion, et ce, de la livraison de l'avion jusqu'à la 1ère grande visite d'entretien (c'est à dire 20 000 heures de vol). Cela peut paraître beaucoup mais pour un avion comme le DC8, plus petit, plus simple et dont le programme d'entretien avait été défini sans utiliser le MSG-1, ce n'était pas 70 000 heures mais 4 000 000 d'heures de travail (oui 4 millions) que la compagnie aérienne devait consacrer jusqu'aux premières 20 000 heures de vol.
. Deuxième exemple : Le programme de maintenance initial du B747 imposait la dépose pour révision (concept "Hard Time") de 8 équipements ou éléments (et notamment aucun sur les moteurs), là où celui du DC8 exigeait la dépose pour révision de ... 339 équipements ou éléments (dont un certain nombre sur les moteurs).

"Le MSG-1 a semble-t-il permis de réduire les coûts de maintenance dans des proportions importantes ?"
C'est vrai. Probablement pas autant que mes 2 exemples pourraient le laisser supposer mais cette réduction de coûts fut loin d'être négligeable (certains avancent le chiffre de 30%). A ce propos, des gains importants furent aussi obtenus parce qu'il n'était plus nécessaire d'acheter autant de matériels de rechange. En effet, moins de révision d'équipements (dans le cadre de l'entretien programmé) a conduit à moins d'achat d'équipements pour couvrir ces révisions. Les moteurs d'avion étaient notamment concernés par ces économies possibles. Or un moteur d'avion coûte très cher. Enfin et surtout, il est important de savoir que l'utilisation du MSG-1 ne s'accompagna pas d'une diminution de la fiabilité.

A suivre ....

Références :
. Reliability-Centered Maintenance Chapter 4 by Anthony M. Smith
. Reliability-Centered Maintenance Appendix B by Nowlan and Heap
. Basics of Aircraft Maintenance Programs for financiers by Shannon P. Ackert
. MSG-3 based Maintenance & Performance-based Planning and Logistics programs by Intergraph